En fait, c’est parce que je suis allée à un forum de l’emploi saisonnier le 1er avril. Il y avait un stand superbe de certains agriculteurs du coin qui s’étaient réunis. Il était très bien fait, avec des sacs de graines, du pain, des explications sur les asperges… Mais bon, ils n’avaient personne alors je suis allée parler avec eux et j’ai laissé mon CV. Evidemment ils ont peu de postes administratifs, et m’ont demandé s’ils pouvaient m’appeler s’ils avaient des besoins en main d’œuvre dans les champs. Et j’ai dis oui, ce pouvait être amusant non ? Bon, je ne pensais pas qu’ils m’appelleraient le soir même pour le lendemain !!

Et c’est facile de planter des échalotes ?

Tu prends une échalote, tu la plantes à moitié dans la terre, et dans le bon sens c’est important, et tu recommences 20 cm plus loin ! Et le sillon fait au moins 600 m de long. Tu le fais sur 2 ou 3 rangs à raison d’une échalote toute les 2 secondes, cela te fait…

Stop, stop, on s’en moque !

Oui, c’est vrai, mais quand tu y es, tu as le temps de faire du calcul mental ! Tu sais que (j’ai posé la question…) cela leur coûte moins cher de payer de la main-d’œuvre pour planter leurs échalotes que de planter à la machine car il y a 20 % de perte pour cause d’échalotes plantées à l’envers. Et le plus cher, c’est le plant : 5 000 € à l’hectare.

Tu as le temps de bavarder alors…

Théoriquement oui. Mais nous n’étions pas nombreux à parler français ! Sur 20, nous n’étions que 2 Français. C’est un boulot dur, personne n’en veut, alors ceux qui ont vraiment besoin de travailler et ne peuvent pas faire autre chose, on les retrouve là. Pas d’étudiant, ce n’est pas la bonne période pour eux.

Et tu es assise pour faire cela ?

Tu plaisantes ! On est penché, puis accroupi, puis à genoux, … Et puis le lendemain on a mal partout, on ne peut plus se mettre à genoux, ni accroupi, ni penché… Et il faut tenir 8 h 45 par jour auxquelles tu rajoutes 2 pauses de chacune 15 mm (pas une minute de plus, et comme tu es au milieu du champ de 15 hectares, la machine à café, tu oublies !!) et tu as une heure pour déjeuner…

Tu es vraiment timbrée !

Peut-être, mais je suis contente, j’ai tenu les 3 jours ! Il y en a beaucoup qui ne reviennent pas le lendemain. Et des plus jeunes que moi ! Il y a une jeune femme qui est arrivée un matin à 8 h, en survêtement rose, une heure après elle est partie en pleurant ! Bon ce n’est pas si terrible, tout le monde a fait un petit boulot à un moment ou à un autre.

Tu ne vas pas y retourner quand même ? Tu déroges !

Déroger, déroger … c’est en plein air, cela change ! Bon, je préfèrerais le vent marin que le vent de la Beauce mais j’ai été appréciée par le chef d’équipe, il m’a proposé de revenir pour les asperges, il parait que c’est moins dur ! Ou le binage des citrouilles, ou le ramassage des pierres… Là, je plaisante je crois !

Je viens de lire, dans le « Canard embourbé », une citation d’un de nos chers politiques : (je transforme un peu) « l’emploi, c’est un sillon que l’on creuse. On sème et on récolte. » Alors je continue à semer…